Privatisation du vocabulaire ! le début de l'hypnose collective

Vous ne le savez peut-être pas, mais, en tant qu’hypnotiseur, je n’ai pas le droit d’employer un certain nombre de mots au premier rang desquels, théoriquement, celui d’hypnothérapeute. Nous sommes, suivant les écoles, des hypnologues, des hypnotiseurs ou des accompagnants par l’hypnose (vous pourrez m’appeler Alain).

Pourquoi pas « thérapeute » me direz-vous ? Dans le dictionnaire, un thérapeute est une « personne qui soigne des malades ». Le mot est lâché : « soigner ». Ah, mais celui-là je n’ai pas le droit de l’utiliser non plus (puisque je ne suis pas thérapeute). Et pourtant, bien que n’étant pas médecin, je me soigne non ? Cependant, je ne prends quasiment aucun médicament, d’une part parce que j’ai la chance d’être en bonne santé physique et d’autre part parce que la chimie ne me convient pas. Mais alors, comment fais-je pour me soigner ? Tout simplement : je prends soin.

Aurait-on oublié ce que soigner signifie ? Il s’agit d’abord et avant tout de « prendre soin ». En ce sens - que j’ai le droit de l’utiliser ou pas - j’essaie, autant que je peux de soigner les personnes qui viennent me voir. Je prends soin d’elles comme je prends soin de moi (et chacun prend soin de lui comme il l’entend, comme il sent que c’est bon pour lui).

Alors, je ne suis pas thérapeute et je ne vous soigne pas, de même que vous n’êtes pas mes patients (vous savez, ceux, sans doute, qui attendent d’être soignés). Non, vous n’êtes pas mes patients, car, ça non plus, je n’ai pas le droit de le dire. Alors, vous êtes mes « clients » (certains thérapeutes emploient le mot « consultant »). Car en venant me voir, vous attendez que je vous rende un service et pas dans 10 ans, vous n’avez pas à être « patient » ! Si vous venez pour changer, c’est au plus vite n’est-ce pas ?
Ne confondons cependant pas vitesse et précipitation ! Dans un autre article j’évoque le danger du toujours vite. Il en est de même pour le changement. Si vous changez d’habits, il vous faudra mettre la chemise avant le pull, le slip avant le pantalon, il vous faudra peut-être vous assurer que cette couleur va bien à votre teint du jour, bref, vous ferez les choses du mieux possible.

Changer c’est d’abord une volonté de prendre soin de soi, c’est avant tout votre motivation, le reste suivra, à son rythme, avec ou sans l’aide d’une rencontre, éventuellement avec un thérapeute (pardon, d’un praticien en prise de soins de vous). Et si vous voulez changer, ça n’est pas que vous êtes « malade », non (car ce mot là non plus je n’ai pas le droit de l’utiliser), vous êtes … euh … bah, « pas bien ». Et pourtant, le mot « maladie » (mal a dit) devrait tellement être écouté par chacun de nous avant d’aller voir un quelconque soignant.

L’hypnose n’est pas seulement une technique loin s’en faut, elle est avant toute chose une relation entre deux individus et cette relation ne peut être fondée sur autre chose que sur la confiance, elle fonde la « relation thérapeutique ». Et la confiance, ne commence-t-elle pas par les mots, ceux que l’on utilise avec confiance et qu’on autorise l’autre à utiliser car ils ne font pas peur.

Les meilleurs hypnotiseurs du monde sont les bras d’une mère ou les rires d’un bébé et rappelez-vous comme cette thérapie soigne de nombreuses maladies (oups !).

Pour aller plus loin 2 spécialistes de la “privatisation du langage” (Nota Bene : ils sont politisés mais la rhétorique est malheureusement beaucoup utilisée par nos hommes et femmes politiques de tous bords)) : Franck Lepage ou Clément Viktorovitch que vous trouverez l’un et l’autre sur Youtube.

NB : Suite à la mise en ligne de cet article, certains confrères m’ont indiqué que le terme “hypnothérapeute” était autorisé. J’ai donc immédiatement vérifié à nouveau me sources. Pour être clair, je n’ai rien trouvé qui soit à la fois digne de confiance (un texte de loi ou une jurisprudence), clair et disant précisément que j’ai tort ou que j’ai raison. Dans tous les cas cela soulève un autre écueil : notre cerveau, totalement surinformé, n’a plus les moyens de se “rassurer” avec une “vérité”. Ceci génère du stress et la dégradation du microbiote de notre système digestif (ceci fera peut-être l’objet d’un autre article). En attendant, sur “hypnothérapeute, ne me croyez pas, mais vous pouvez croire que je ne me qualifie pas ainsi.

#déshypnotisons-nous

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